Le Grand-Duché de Luxembourg est sans conteste, parmi les 27 Etats membres de l’Union européenne, l’un de ceux qui peut se targuer de la meilleure gouvernance, et cela sur presque tous les plans : ceux de la politique européenne, de la politique nationale, de la sécurité et de l’équité sociale, de la gestion de la crise économique et industrielle, de l’éthique financière (grâce, depuis peu de temps il est vrai, à une plus grande transparence des pratiques bancaires) et, nous allions oublier l’essentiel, sur les plans de l’ouverture au monde, de l’accueil des cultures – et des langues – du monde.
Et parmi ces « langues du monde » figure en bonne place celle qui fut, avec l’allemand, à l’origine de la construction européenne : le français. Or, ni l’allemand ni le français ne sont les langues vernaculaires des 650.000 habitants du Luxembourg (dont 43 pc n’ont pas la nationalité grand-ducale), puisque le parler local est le letzebuerger. C’est seulement dans les régions frontalières (France, Allemagne, Belgique) que la langue du peuple est le français ou l’allemand, sans oublier, dans quelques « poches » démographiques, le portugais (conséquence d’une immigration spécifique) et l’anglais (langue de travail des institutions européennes et financières).
Notons qu’au demi-million de résidents permanents il faut ajouter 160.000 travailleurs frontaliers, en majorité Français et Wallons, présents en permanence sur le territoire pendant la plus grande partie de l’année. En fait, 47 pc de la population sont de nationalité étrangères ou des bi/multi-nationaux
Mais quiconque se balade à travers cette « mini-Europe heureuse » entendra parler, jusque dans les moindres recoins, la langue de Voltaire : et il ne s’agit pas ici d’une réminiscence d’un passé historique largement influencé par la France : toute la jeunesse luxembourgeoise connaît et parle le français qu’elle a étudié depuis l’école primaire et presque exclusivement dans l’enseignement secondaire et supérieur. Et – cerise sur le gâteau, oserions nous dire – les locuteurs de français, en fait la grande majorité des Luxembourgeois, sont heureux et fiers de parler cette langue, même s’ils cultivent aussi, avec tendresse, aux niveaux local, familial et commercial, leur letzebuerger natal.
Un exemple flagrant de cette fierté est la publication bien en vue dans la revue de bord de la compagnie aérienne nationale Luxair (au nom bilingue anglais-français : « Flydoscope ») de l’utilité de la pratique du français, à côté bien sûr de celle de l’allemand et de l’anglais. Cette « proclamation » a pour titre : « Un multilinguisme unique au monde ».
Le Luxembourg est, avec la Belgique et la Suisse, l’un des rares pays qui ait trois langues officielles dont le français. Le trilinguisme est l’un des meilleurs atouts pour obtenir un emploi de haut niveau au Luxembourg. En sus du letzebuerger, les autres langues vernaculaires son le français… et l’anglais. Et l’auteur de citer le commentaire du directeur de l’une des principales écoles de langue de la place : « Dans les demandes de formation que nous recevons, un tiers concerne le français, un autre tiers l’anglais ». Le tiers restant est représenté par toute une série d’autres langues, dont l’allemand. Il faut reconnaître, ajoute-t-il, que les germanophones comprennent et s’expriment en anglais mieux que les francophones. Mais la part des travailleurs francophones au Luxembourg est telle que l’apprentissage du français constitue une exigence pour tous.
Cela étant, le caractère de plus en plus international du Luxembourg incite ses employeurs à être très exigeants sur le plan des langues. Et d’évoquer une annonce d’offre d’emploi pour une boutique de luxe au centre de Luxembourg, où l’on exigeait que le réceptionniste parle « au moins le français, l’allemand et l’anglais ». Eh bien, celui qui a été engagé parlait, outre ces trois langues, le luxembourgeois (of course)… et le russe et le chinois de surcroît ! Et l’employeur précise, sans rire, que ce n’était pas pour autant un agent secret !
Et d’ajouter : mais ne vous méprenez pas, l’idiome local, le letzebuerger n’a rien à voir avec ce que l’on pourrait appeler la langue du pauvre. Bien au contraire, pour se refiler les bons tuyaux (en bourse par exemple)…mais aussi les bonnes recettes gastronomiques de grand-mère ou de la tante d’Esch-sur-Alzette, c’est bien dans son savoureux – et quelque peu indéchiffrable - letzebuerger que le natif du Luxembourg s’exprimera le plus volontiers…
André Buyse.
« Ai Ke Xing », vous connaissez certainement cette bonne ville au cœur du Hainaut ? Sûrement puisqu’un milliard de Chinois – un milliard seulement car il faut éliminer les jeunes enfants et ceux qui ne peuvent pas encore capter la télévision nationale chinoise CCTV – la connaissent bien. Ai Ke Xing, vous avez deviné, c’est la transcription en « pinyin » (langue chinoise romanisée) de la ville d’Ecaussinnes, entre Nivelles et Seneffe, connue chez nous comme terroir du « barde wallon chantant », Julos Beaucarné (récemment décédé), et pour son château-fort d’Ecaussines-la Follie.
Les Chinois, eux, la connaissaient bien jusqu’il y a une quinzaine d’années, pour avoir suivi sur leur chaîne de télévision une série de fiction en seize épisodes intitulée : « Une Chinoise sous le fusil de la Gestapo ».
Il s’agit d’une histoire se déroulant en Belgique sous l’occupation (1940-45) inspirée de la vie authentique d’une étudiante chinoise en sciences, Jin Ling (c’est son nom fictif choisi pour les besoins du film), arrivée en Belgique en 1929 (à la même époque que Tchang Tchong Jen, celui qui fut l’ami et l’inspirateur d’Hergé pour son album mythique « Le lotus bleu »).
L’héroïne du film, l’étudiante Jin Ling inscrite à l’Université Libre de Bruxelles, n’avait, au cours de l’été 1940, pas eu la possibilité de rentrer dans son pays, la Chine, alors occupé partiellement par le Japon. Son exploit fut d’avoir réussi à soustraire une centaine de résistants belges d’origine écaussinnoise – devenus des otages aux mains de l’occupant nazi - à l’exécution capitale ordonnée par la Gestapo.
Les maquisards d’Ecaussinnes avaient en effet dû abattre des gradés allemands au cours d’une mission en vue de la libération d’un personnage de la Résistance, le capitaine Jean-Piere Carez, qui avait été parachuté au-dessus de la Belgique pour organiser une section de l’Armée secrète (l’une des principales branches de la Résistance)
Une "connaissance" de von Falkenhausen
La jeune Chinoise, dont on avait appris que sa famille en Chine avait été en contact avec un officier allemand du nom de von Falkenhausen, naguère proche de Tchang Kai Chek à Nankin, et qui avait précisément été nommé « Feldkommandant » (gouverneur militaire) de la Belgique occupée, avait été approchée par des patriotes écaussinnois : ils la supplièrent de tenter de faire pression sur von Falkenhausen pour éviter la mise à mort des patriotes belges.
Usant de son charme et de souvenirs de vie partagés naguère en Chine avec l’officier supérieur allemand qui avait été conseiller militaire de Tchang Kaï-chek, elle parvint à obtenir de von Falkenhausen que la peine de mort de 96 de ces résistants soit commuée en peine de détention. Ainsi, la quasi-totalité de ces résistants wallons fut sauvée des camps à la Libération.
La jeune Chinoise fut par la suite décorée dans les ordres nationaux belges par le prince Charles, qui était alors « Régent » du Royaume de Belgique jusqu’au retour du de captivité du roi Léopold III. Jin Ling continua d’ailleurs à résider en Europe, s’installant définitivement à Bruxelles. Et bien qu’elle se refusa à toute médiatisation de son attitude sous l’Occupation, son acte inspira un romancier et suscita bien plus tard la curiosité d’un journaliste, qui dévoila en long et en large, dans les années septante, donc après que la Belgique ait reconnu diplomatiquement la Chine populaire, le parcours exemplaire de notre héroïne sino-belge. Il n’en fallut pas moins pour attirer l’attention des autorités diplomatiques chinoises à Bruxelles en charge de la culture et des médias. Ces dernières finirent par proposer l’idée du scénario d’une série télévisée destinée aux téléspectateurs de l’Empire du Milieu, tout en les éclairant sur certains aspects de l’histoire contemporaine d’Europe de l’Ouest revus et corrigés par les censeurs du Parti communiste chinois.
A noter que, dans cette série télévisée chinois, les noms de personne et de la plupart des lieux-dits avaient été modifiés. De mêmes, pas mal de faits historiques avaient été « révisés », selon une pratique toujours bien en vigueur à Pékin afin de procéder à une réécriture systématique de l’Histoire.
Il n’était pas question pour autant d’occulter les éléments essentiels de la trame de la « petite Histoire » sous l’occupation allemande de la Belgique, le film faisant référence à de nombreux sites aisément reconnaissables, notamment dans les villes d’Ecaussinnes (avec l’emplacement du dispensaire médical où Jin Ling avait dû « se recycler » après avoir été contrainte d’abandonner ses études à l’ULB), de Mons, Nivelles, Dinant, La Hulpe, Ittre, Bruxelles (quartier universitaire du Solbosch, sites de Tours et Taxis, musées et parc du Cinquantenaire, etc).
150 comédiens et figurants
Le film a été tourné sous la direction d’une équipe de trente experts chinois, en coproduction avec quelques réalisateurs belges. Il a nécessité la participation de 150 comédiens et de plus de 600 figurants, le rôle principal étant assuré par une célèbre actrice chinoise du nom de Xu Qing. Le montage fut réalisé en Chine par ,des professionnels la chaîne publique CCTV, en coopération avec les XiaoXiang Movie Studios ainsi que la Fédération Nationale des Femmes Chinoises, celle-la même qui fut à l’origine du périple que la reine Elisabeth de Belgique effectua en janvier 1961 en République Populaire de Chine…sans l’assentiment du gouvernement belge, Pékin n’étant à l’époque pas reconnu diplomatiquement par la Belgique.
Cette série de 14 épisodes (un peu tirée en longueur il est vrai…au point d’inclure dans le scénario le procès pour crimes de guerre intenté par la Justice militaire belge contre le gouverneur allemand von Falkenhausen) a été vue, revue – et entendue en chinois-mandarin – dans la plupart des villes de Chine. C’est par ce biais que le nom de Ai Ke Xing, transposition phonétique de la ville d’Ecaussinnes a été retenu de tous les téléspectateurs chinois.
La série télévisée chinoise, avec ses sous-titres en français, fut par la suite – dans la première décennie des années 2000 – largement diffusée sur des chaînes de France (TV5 Europe) et de Belgique, sous le titre « Une Chinoise sous le fusil de la Gestapo ». Des cassettes-vidéo de la version sous-titrée en français furent commercialisées à la même époque.
Le doublage en français a été réalisé grâce à une aide publique belge : il fut en effet financé à concurrence d’un million d’euros par la Communauté française de Belgique. Via TV5, la série fut diffusée sur les cinq continents.
Mais quinze ans plus tard, on ne trouve plus la moindre trace à Pékin de cette série malgré le grand succès d’audience qu’elle connut en Chine. Cela se passait, il est vrai, à l’époque où la Chine était pilotée par un homme encore favorable à une large ouverture culturelle et économique à l’Europe, le président Hu Jintao. Auquel succéda « l’empereur à vie » qu’est devenu l’actuel président Xi Jinping qui dirige aujourd’hui d’une main de fer l’Empire du Milieu. Et rejette désormais toute influence occidentale, a fortiori quand le pays de référence est celui qui abrite Bruxelles, la capitale d’une Union Européenne démocratique, considérée par les nouveaux dirigeants chinois, en cette ère post-Covid et post-guerre ukrainienne, à la fois comme un rival systémique et comme un adversaire idéologique.
André Buyse
On parle beaucoup de l’ouverture au tourisme, en dépit d’une situation politique instable et niant largement les libertés individuelles et le respect de l’Etat de droit, de la République du Myanmar, selon l’appellation conservée par le nouveau pouvoir politique de ce que tout le monde reconnaît comme étant « la Birmanie » : un pays magnifique tant pour ses paysages que pour ses traditions, non encore défiguré par un activisme immobilier destructeur (hormis dans sa nouvelle capitale Nayidawn), un pays à la population pacifique et accueillante, un pays dont la majeure partie de la population pratique un bouddhisme vivant, flamboyant, triomphant (au point de rejeter ses minorités musulmanes), riche en merveilleux monuments.
Le cas sinistrement exemplaire de la Birmanie
Toutes ces caractéristiques sont bien entendu utilisées par les autorités du tourisme birman à l’étranger, à la fois pour redorer le blason politique d’un Etat maudit pour sa gouvernance dictatoriale et son mépris des droits de l’homme, mais aussi dans le but de faire du Myanmar une destination asiatique « branchée ».
A présent, le pays est ciblé par les organisateurs de croisières fluviales qui commercialisent de fascinantes croisières sur l’Irrawadi, l’un des plus longs fleuves d’Asie, qui prend sa source dans l’Himalaya et traverse la Birmanie dans sa plus grande longueur. Il commence timidement à être aussi la cible des loueurs de voitures sans chauffeur car si les sites remarquables sont légion et disséminés sur tout le territoire birman, les transports publics autres qu’aériens demeurent rudimentaires. Pour les déplacements en voiture de location, l’un des freins semble être, bien curieusement, la peur des candidats à se soumettre, comme en Inde, à la conduite à gauche.
« Bien curieusement » disions nous…car presque tout le monde ignore qu’en Birmanie, cet ancien fleuron de l’Empire des Indes, on roule à droite. Depuis 1970 seulement.
Le pays (qui avait obtenu son indépendance en 1948, soit un an après l’Inde et le Pakistan) était dirigé par un gouvernement nationaliste fort marqué à gauche… et d’autant moins ouvert à son ancien colonisateur que Londres a permis le rattachement à l’Inde de sa province la plus orientale, l’Assam, qui, historiquement, faisait partie intégrante de la Birmanie…une disposition que Rangoun n’a jamais complètement digérée. Donc, par pur geste de mauvaise humeur à l’égard de son ex-mentor britannique, en 1970 le gouvernement de la Birmanie, où l’on roulait depuis 22 ans à gauche comme partout ailleurs dans l’Empire des Indes, décréta du jour au lendemain : conduite à droite obligatoire pour tous.
Le cas est exemplaire car s’il y eut de nombreuses inversions du sens de circulation au niveaux des Etats (surtout de la gauche vers la droite) depuis deux siècles, ces changements participaient d’une logique économique, culturelle ou stratégique mais jamais, comme en Birmanie…d’un coup de gueule politique.
... et celui tout aussi ambigu d'Okinawa
En fait les changements ponctuels de sens de la conduite intervinrent plutôt dans la première moitié du XXe siècle. On ne connaît qu’un cas ultérieur à celui de la Birmanie : le passage de droite à gauche de la conduite à Okinawa en 1978, à l’occasion de la fin de l’occupation administrative par les Etats-Unis de cette province insulaire abritant une grande base militaire américaine, sachant qu’au Japon on a toujours conduit à gauche.
Les tribulations birmanes nous ont amené à nous pencher sur cette problématique du sens de conduite qui devraient intéresser au plus haut degré sinon le secteur touristique en général du moins une catégorie bien particulière de ses opérateurs : les agences internationales de location de voiture sans chauffeur.
Dans le monde, il existe une bonne trentaine d’Etats, sur les 193 reconnus aux Nations-Unies, qui ont adopté le système de la conduite automobile à gauche (et une cinquantaine de « territoires » si on inclut les diverses dépendances de certains de ces Etats dont, essentiellement, la Grande-Bretagne).
Or, à notre connaissance, aucun des grands loueurs de voiture sans chauffeur ne distribue à leur clientèle potentielle de carte planétaire des pays « à droite » et des pays « à gauche », ce qui serait simple à réaliser sur base, par exemple, des informations disponibles sur internet.
Nous imaginons cette carte : si l’on choisit le noir pour la conduite à droite et le rouge pour celle à gauche, on observe que pratiquement toutes les terres émergées sont « noires » …avec seulement trois grosses taches rouges : l’Afrique de l’ouest, le sous-continent indien et l’ensemble Australie-Nouvelle-Zélande-Indonésie.
Et bien sûr quatre autres gros « points » rouges : îles britanniques, Surinam-Guyana, Thaïlande-Malaisie et Japon. A quoi il faut ajouter les confettis des mini-Etat de l’Océanie anciennes colonies britanniques.
Les trois quarts de la planète carburent à droite
En fait, sur les trois quarts de la planète, les voitures (pas les trains) roulent aujourd’hui à droite. Cette proportion en faveur de la droite était bien moindre au début du siècle dernier : en Europe centrale et du Nord, dans les pays germaniques, au proche et au moyen Orient, on roulait encore à gauche. C’est la première guerre qui a déclenché une première vague de passages à droite. Ce sont les années succédant à la fin de la seconde guerre (et notamment les années de décolonisation) qui ont entrainé le passage à droite de grands pays comme la Chine (sauf Hong Kong), le Soudan, la Nigéria, l’Ethiopie, l’Argentine, les Philippines, l’Islande. Et bien sûr, il reste le gros morceau du Proche-Orient ex-britannique et du sous-continent indien (Pakistan, Inde, Bangladesh, vaste zone de conduite à gauche qui a « avalé » les anciennes possessions portugaises (la province de Goa et sa capitale Panji) et françaises (Pondichéry et divers comptoirs dont Chandernagor et Mahé).
Il y a une autre énorme « anomalie », qui se trouve en Afrique de l’ouest : le Mozambique, vaste pays qui lui aussi, a choisi de passer à gauche alors qu’au Portugal et partout dans ses autres (ex-) dépendances et colonies portugaises on roulait à droite (et cela depuis 1928). Autre mini-exception lusitanienne : depuis son indépendance, acquise en 2002, Timor-Est (Timor Leste) a décidé de rouler à gauche (comme c’était le cas sous l’occupation indonésienne de cette île de 1975 à 2002).
En revanche Gibraltar, qui est l’un des derniers territoires ayant toujours le statut de colonie britannique, a opté pour la conduite à droite, comme dans l’Espagne environnante. A part les îles britanniques, seuls deux Etats européens, d’ailleurs membres de l’Union Européenne (UE), roulent encore à gauche : Malte et Chypre (y compris Chypre nord, soit le tiers de l’île, un pays à l’indépendance usurpée et non reconnu par la communauté internationale, et de facto province ottomane depuis l’invasion militaire de 1974…qui est donc bien la seule partie de la République Turque où l’on roule à gauche).
Bizarrement, l’ancienne Guyane hollandaise, Surinam, a opté pour la gauche et est donc l’un des très rares Etats « routièrement gauchistes » des Amériques, avec la Guyana, le Belize, les îles Caïman, la Jamaïque et les Bermudes.
Hong Kong et Macao font de la résistance
Dernière « curiosité » de cet étonnant puzzle mondial : deux métropoles chinoises, Hong Kong (qui fait plus de 1.000 km2 avec les Nouveaux territoires et les 233 autres îles de l’archipel) ainsi que Macao (l’ex-enclave portugaise de Chine) roulent bien à gauche tout en restant directement connectées aux routes de Chine continentale : aux points de passage de ce qui constitue toujours, assez étrangement, une « frontière » (car ces territoires sont considérés comme des « zones administratives spéciales » de la République populaire de Chine), les automobilistes sont invités à changer de sens immédiatement après avoir passé les portiques de douane toujours présents.
Mais, que l’on roule à droite ou à gauche, les slogans touristiques des voyagistes clament toujours « vive la route des vacances »… malgré les contraintes nouvelles liées à la hausse durable du prix des carburants, d’autant plus qu’à ce jour peu d’opérateurs ont converti même partiellement à la traction électrique leur parc de voitures de location.
Mireille Rousseau
On a déjà pas mal glosé, non sur « l’anglicisation normale », c'est-à-dire sur l’enrichissement d’une langue, fut-elle de culture ancienne et de diffusion internationale, par incorporation de mots nouveaux, utiles, irremplaçables mêmes (comme « gadget », « gag », « pull-over », « ticket », « jazz », « crash » ou « tramway », mais surtout sur ce que nous appellerons les conséquences de la crétinisation rampante qui nous ont fait adopter, consciemment ou par inadvertance, des termes onomatopéiques, disharmonieux, cassants, généralement importés de l’anglais.
On a parlé d’abord de l’impact sur notre langue, de « l’anglais de cuisine », utilisé surtout dans les congrès, les conventions et autres réunions internationales, puis à partir de 1959 grâce à Etiemble de « franglais », puis de « frenglish » et maintenant, de manière plus exacte sans doute, de « globish », c’est à dire de « global english ». Car il s’agit bien d’un anglais « global », élémentaire, embryonnaire, amputé, incertain, ambigu, ouvert à toutes les interprétations, tous les malentendus, toutes les frictions et incompréhensions, une langue que tous, du simple quidam gardien du bon sens à l’homme de science, à l’intellectuel sans arrogance, conspuent, à commencer par les anglophones eux-mêmes.
Les dégâts sont visibles partout, tous les jours aussi bien dans l’Hexagone que chez nous, en Belgique francophone, où ils font plus qu’Outre-Quiévrain mal parce que, ici, la dignité et peut-être la survie du français sont un combat quotidien en même temps qu’un argument permanent pour justifier l’emploi et la promotion d’une langue de réputation et de diffusion internationales.
"global american way of life"
Que n’a-t-on dénoncé les dérives multiples, quotidiennes, aussi dérisoires en apparence que sournoises en réalité qui se sont fait jour chez nous : on banalise des termes comme « bootik » pour échoppe, « kiosk » pour guichet, « bPost » » pour La Poste, « cinematek » pour cinémathèque, « bozar » pour Palais des Beaux-Arts, « podcaster » pour télécharger, « checquer » pour enregistrer, « voucher » pour bon d’échange, etc, etc.
Le phénomène est plus inquiétant chez nous parce qu’il ne résulte pas de ce que l’on pourrait appeler comme en France une « attrition », une métamorphose plus ou moins naturelle, « spontanée » résultant de la globalisation, de l’intrusion universelle de « l’american way of life », y compris par le biais de langues non anglo-saxonnes mais désormais imprégnées de culture nord-américaine (japonais, espagnol, chinois, russe) : chez nous il procède, par surcroît, d’un combat de tranchée de nature politique pour saper sournoisement – au nom d’une prépondérance ethnique de nature tribale, non seulement l’usage de la langue mais également la notoriété de la culture française. Il n’est pas nécessaire de faire un petit dessin à destination des citoyens d’un des derniers pays d’Europe occidentale qui refuse de ratifier la convention européenne sur les droits des minorités.
Car dans notre royaume fédéral, ce n’est pas principalement de « l’attrition » du secteur privé que vient cette déliquescence de la langue française mais d’initiatives publiques, des initiatives qui se multiplient et se précisent depuis un demi-siècle (1963), depuis l’imposition par une majorité démographique des lois dites « linguistiques » fixant une vraie frontière linguistique, une frontière administrative légale.
Rappelons qu’en Suisse, un pays non pas fédéral mais confédéral et plurilingue, il n’existe pas ce type de frontière : même l’un des Etats confédérés les plus vastes du pays, le Valais (Wallis en allemand), qui est peuplé presque à parts égales de francophones et de germanophones, n’est pas décomposé, scindé, par une frontière : il n’y qu’une seule administration confédérée pour tous les Valaisans.
Messages publicitaires conçus et pensés par des anglo-saxons
On mentirait en affirmant que la Suisse est préservée des problèmes linguistiques et en particulier des atteintes à la qualité de la langue française : de nombreuses associations de consommateurs se plaignent de ce que les agences de publicité helvètes, qui sont, comme chez nous d’ailleurs, dans leur grande majorité de culture anglo-saxonne, transmettent à la clientèle francophone des textes, slogans, annonces audiovisuelles qui ont visiblement et auditivement été conçues, pensées en allemand : le message diffusé en français n’est souvent qu’une très mauvaise et parfois tout à fait contreproductive traduction française, car le mot d’esprit, la rime, la mélodie qui produisent un excellent effet en allemand (ou en néerlandais chez nous) sonne faux, devient lamentable et parfois ridicule en français.
Les Suisses francophones ont tenté de pallier cet état de fait en créant une sorte de « prix citron » aux plus mauvaises publicités en français, initiative dont se fit naguère l’écho une organisation professionnelle suisse de journalistes francophones. Il faut être en Suisse pour que cela soit possible : les annonceurs publicitaires « primés » et donc tournés de la sorte en ridicule encaissent le coup de bonne grâce et ne réduisent ni ne suppriment les encarts publicitaires dans les médias francophones qui se sont royalement moqués d’eux.
Autre exemple dans le secteur culturel : une très intéressante exposition sur les dommages de guerre (les deux guerres mondiales et les premières années de l’indépendance du Congo) s’est déroulée cet hiver au siège des Archives générales du Royaume sous le titre – bizarrement très différent d’une langue à l’autre – « la Belgique meurtrie » en français et « Beschadigd België » (littéralement : « la Belgique endommagée ») en néerlandais, comme si les victimes néerlandophones n’avaient essuyé que des « dégâts » et les francophones de vrais malheurs. Mais ceci n’est qu’un détail secondaire : le manque de considération à l’égard des francophones résultait de la confection même du catalogue. Etait-il bilingue néerlandais-français 50-50 ? Assurément ! Une colonne en néerlandais et en regard une colonne en français. Mais le texte néerlandais est imprimé en caractères noirs bien nets. Le texte en français est imprimé en caractère gris légers, difficilement déchiffrables même pour le lecteur doté d’une bonne vue. Que dire alors des personnes âgées…
Ceci pour illustrer le fait qu’en Belgique, à la différence de ce que l’on constate en France, en Suisse ou au Canada (où dans les infrastructures publiques nationales, toutes les informations à destination du public sont bilingues anglais-français, y compris dans les provinces exclusivement anglophones), au vent d’anglomanie privée s’ajoute un tourbillon public de dévalorisation du français, au profit de la langue « globish » partout où il n’est pas possible de faire prévaloir le néerlandais (c'est-à-dire à Bruxelles et dans la périphérie).
C’est très visible à l’aéroport de Zaventem, présenté désormais comme un aéroport flamand, dans les gares ferroviaires de la région bruxelloise où l’avantage est donné à tous les annonceurs flamands (privés et publics), dans les ministères (mot abandonné au profit du vilain sigle SF parce que en néerlandais « ministerie » faisait trop « latin ») et sur les panneaux de l’affichage public.
La diversité linguistique est l'avenir de l'homme
Mais ce qui est le plus débilitant pour les amoureux de la langue de Voltaire – c'est-à-dire pour l’écrasante majorité des Bruxellois, des majorités de citoyens des communes de la périphérie et pour plus de 150.000 résidents de la « Flandre profonde », c’est la déliquescence du français résultant de l’envahissement international du phénomène globish, cette « novlangue » dénoncée par les auteurs prophétiques que furent George Orwell et Aldous Huxley mais aussi par les linguistes contemporains anglais les plus représentatifs, tel Sir David Crystal,.
Ce dernier, auteur du célèbre « English as a Global Language » dit dans un de ses ouvrages publié dès 2010 que « ce qui est important, c’est la diversité linguistique » et qu’ « il importe que tous les anglophones s’intéressent suffisamment aux langues pour vouloir en apprendre autant que possible ».
Il est évident, estime-t-il encore, que « l’avenir ne se pense pas uniquement en anglais (…) Les trois quarts de la population mondiale ne sont pas capables de communiquer en anglais et cela ne va pas les empêcher de penser ».
Et ce propos d’un professeur de lycée de Middlesborough rapporté par l’ONG DLF (Défense de la langue française) : « S’il est vrai que la France, comme la Grande-Bretagne, n’est plus une superpuissance sur la scène internationale, il n’en reste pas moins vrai que la France a apporté une énorme et précieuse contribution au développement culturel du monde et qu’elle est dotée du talent et du génie nécessaires pour continuer à y contribuer de manière significative ». Etonnant « cocorico » lancé par un professeur « british pur jus » !
Alors, qu’on nous permette de rire (jaune) quand le syndicat d’initiative de la ville de Lyon ne trouve d’autre slogan touristique que « Only Lyon », ou quand les administrateurs de notre si peu efficace entreprise wallonne des transports en commun TEC adoptent de leur côté le slogan commercial « TEC it easy » (« TEC » pour « take », of course !). Ainsi tout fait farine au moulin des régionalistes à courte vue.
André BUYSE
L’image que nous reproduisons ci-dessus est celle d’une action émise en 1881 à Bruxelles par la « Société Anonyme des Tramways d’Odessa », société au capital de 6,3 millions de francs de l’époque, établie dans la capitale belge et cotée en Bourse de Bruxelles.
C’était l’une des 29 sociétés d’exploitation de transports en commun urbains créée dans les grandes villes de l’empire tsariste (la Russie actuelle, plus des portions de territoire devenus polonais, lettons, ukrainiens, biélorusses, géorgiens, ouzbékistanais, etc, mais sans atteindre les dimensions de l’ex-URSS) par les grands investisseurs belges du rail qui firent florès dans le monde entier, quasi sans interruption (à l’exception des deux guerres) de 1870 à nos jours. La Russie n’était jamais qu’une partie du champ d’exportation des industriels du rail belge. N’oublions pas que c’est l’Hennuyer Edouard Empain, créé baron par le roi Léopold II, qui fut le premier constructeur du métro de Paris inauguré pour l’Exposition de 1900.
Mais les industriels belges du rail ont construit également des réseaux de trams et de métro dans plus de 150 villes dans le monde, inondant de leur technologie de nombreux pays d’Europe, du Sud à l’extrême Est du continent, d’Amérique, d’Asie (dont la Chine) du Moyen- et du Proche-Orient, d’Afrique du nord. A côté, de ces réseaux urbains, ces investisseurs belges ont créé et géré d’importantes lignes de chemins de fer (Europe, Chine, Afrique), ainsi que des sociétés d’exploitation de minerais et de distribution d’électricité et d’éclairage public. La période faste de cet engouement planétaire de grands capitaines d’industrie belges date de l’époque où la Belgique, galvanisée par le dynamisme entrepreneurial d’un Roi visionnaire, était considérée comme le deuxième pays le plus industrialisé au monde (après l’Angleterre), soit de 1880 à 1930.
Tout le gratin belge du ferroviaire
La plupart de ces entreprises pionnières du développement industriel international ont survécu aux années et leurs descendants – désormais englobés dans l’économie mondiale et quelques fois intégrés à des groupes étrangers, notamment français, anglais, allemands, néerlandais, étatsuniens – sont toujours bien connus au bataillon : pour l’Ukraine c’étaient Electrobel, devenu Traction & Electricité (Tractionnel), devenue Tractebel…devenue à son tour l’une des grandes branches du groupe français Engie.
Les deux principaux dirigeants des Tramways d’Odessa étaient le Belge Edouard Otlet (1842-1907) et le Français Clément Bonnet. Mais bien d’autres noms sont à ajouter à cette liste de pionniers : groupe Empain, Groupe Thys, Groupe Fraiteur, Sofina, Société Générale de Belgique (absorbée par Suez), groupe Nagelmackers, Banque Josse Allard, Banque de Bruxelles (devenue ING), Banque de Paribas-Belgique, Cockerill, Alstom-ACEC, Brugeoise & Nivelles (BN) et quelques autres arrivés plus récemment, comme Besix, Fabricom, CMI ou Van Hool.
Aujourd’hui les coordonnées de la ville d’Odessa présentent quelques similitudes avec celles de Bruxelles : même nombre d’habitants (1,1 million), même superficie (162 km2 pour 167 km2 pour Bruxelles-19 communes), mêmes fonctionnalités (économie tertiaire, nombreux services et administrations, commerces, activités touristiques, nœud de communication international, multilinguisme) sans parler de l’esprit d’ouverture de la population ainsi que d’un riche patrimoine culturel – avec outres les églises, palais, monuments et opéras, pas moins de 40 musées – et d’un urbanisme dégagé laissant, comme à Bruxelles, une grande importance aux espaces verts.
En 1880, année de la construction de ce qui est considéré comme le premier réseau de tramways électriques de Russie (venu remplacer un réseau public hippomobile caduc exploité par un groupe austro-russe), l’agglomération odéssite comptait, encore une fois comme celle de Bruxelles, quelque 300.000 habitants.
A côté de la société des tramways, les Belges avaient mis sur pied une « Société anonyme d’Electricité d’Odessa », société sœur au capital de 8 millions de francs, pour gérer les centrales électriques et le réseau de distribution (câbles, caténaires, sous-stations). Exactement comme ils avaient fait, à la même époque et dans le même esprit, dans ce qui était alors la troisième plus grande ville de la Chine (une Chine encore « impériale » en ce début du XXe siècle), la ville portuaire de Tien-tsin. Celle-ci, rebaptisée de nos jours « Tianjin », est devenue une métropole de 14 millions d’habitants où la Belgique posséda naguère, à l’instar d’une dizaine de « Grandes Puissances occidentales », une « concession territoriale ».
On notera d’ailleurs que ces deux grosses compagnies belges sur les bords de la rivière Hai He furent expropriées par Mao Zedong en 1949, mais le réseau de tramways créé au début du siècle dernier par les Belges fonctionna, à la satisfaction générale, jusqu’en 1971 ! Aujourd’hui, l’énorme agglomération de Tianjin s’est dotée d’un métro lourd « 100 pourcents made in China ». Mais les réseaux de transport urbain belges n’ont pas pour autant quitté l’extrême Asie, puisque la ligne de métro lourd de 15 km de long, avec ses dix-huit grandes gares urbaines, qui dessert l’agglomération de Manille, l’immense capitale des Philippines, a bel et bien été conçue et installée (en 1973) par un groupement industriel belge portant le nom de Transurb-Consult.
Revenons en Russie où, de la même manière que ce fut le cas quarante ans plus tard en Chine, la propriété et la gestion d’un réseau de transport public par des représentants du capitalisme international (ce qu’étaient les Belges aux yeux des Bolcheviks) ne pouvait résister à l’installation d’un régime communiste révolutionnaire. En 1917, et en dépit de l’occupation de la Belgique par l’occupant allemand, les entreprises « capitalistes » belges exploitaient et possédaient des réseaux de tramways électriques dans encore une bonne vingtaine de villes sur le territoire de « l’empire russe » au sens large : citons, outre Odessa, Kiev et Moscou, Saint-Pétersbourg, Rostov-sur-le-Don, Astrakan, Kazan, Riga, Tachkent, Tiflis, Ekaterinbourg, Koursk, Orel, Saratov, Simféropol , Kichinev…et une dizaine d’autres.
Des actions qui ont encore une valeur de collection
Du jour au lendemain, les cadres et les employés belges ainsi que les actionnaires de ces sociétés perdirent leur emploi, furent dépouillés d’une grande partie de leurs biens, furent expulsés ou durent fuir avec leurs familles. Ce n’est qu’à la chute de l’URSS (et de la dissolution de l’administration communiste) en 1991 que des négociations furent entreprises sous le règne du président Boris Eltsine en vue d’obtenir, pour les descendants et héritiers de ces actionnaires spoliés, un dédommagement au moins partiel. Bien qu’une mission économique belge à Moscou, conduite à l’époque par le Prince Philippe (futur Roi) qui était président d’honneur de l’Office belge du commerce extérieur, avait ce point à l’ordre du jour, elle ne mena qu’à des compensations symboliques…correspondant parfois à la simple « valeur de collection » des documents et coupons relatifs à ces « actions de jouissance » (telle celle qui figure en tête du présent article).
Mais la technologie belge du transport ferroviaire continua à briller pendant encore longtemps, en Europe comme ailleurs dans le monde (tramways du Caire et d’Alexandrie, d’Istamboul, de Buenos Ayres, de Palerme, Varsovie, Manille, etc, etc).
Actuellement le réseau des transports urbains d’Odessa comporte une vingtaine de lignes sur lesquelles circulent des trams modernes de conception tchèque et russe. Les Odessites ignorent généralement que le premier réseau de leur ville était de conception belge, l’esprit des habitants n’étant évidemment pas, dans les circonstances actuelles, mobilisé par ce genre de souvenirs, témoignage d’une histoire vraiment très ancienne, liée au développement économique de la « grande Russie » de tsars qui étaient sur le déclin et obnubilés par leurs préoccupations hégémoniques et autocratiques, lesquelles sont à l’origine de plus d’un siècle de profonds ressentiments ressassés depuis des générations par tout le peuple de l’Ukraine.
Gageons que ces souvenirs deviendront un prétexte – lorsque l’horrible guerre actuelle aura pris fin – pour lancer l’idée d’un fraternel jumelage entre les municipalités de Bruxelles et d’Odessa, puisque celle-ci fut, il y a plus de 140 ans en Ukraine, la ville d’accueil des pionniers belges du tramway.
André Buyse
Le fait n'était, certes, ni ignoré ni occulté, mais bel et bien méconnu, relégué comme un détail sans importance par ses biographes, eux-mêmes en grande majorité citoyens français... et donc sans surprise adeptes de l'hagiographie à l'égard de celle qu'ils ont présentée comme la première occidentale à avoir séjourné au royaume interdit des neiges. Une telle héroïne ne pouvait, bon sang mais c'est bien sûr, qu'être une digne représentante de la République Française.
Est-ce parce que les éditions Glénat, qui est désormais le leader emblématique de l'édition des BD d'expression française, ont confié à un jeune dessinateur croate sans lien direct avec la France, Boro Pavlovic, citoyen de la ville adriatique de Split, la réalisation d'un magnifique album intitulé "Alexandra David-Néel - les chemins de Lhassa", que ce "détail sans importance de la semi-belgitude d'Alexandra" a été rapporté et même souligné avec insistance par le scénariste de l'album paru récemment en librairie. Car outre la BD proprement dite, l'ouvrage contient un dossier historique assez complet auquel ont collaboré les historiens Christian Perrissin et Christian Clot.
Ceux-ci nous révèlent que l'héroïne de Lhassa, prénommée à l'état-civil Louise Eugénie Alexandrine Marie mais plus connue sous le nom d'Alexandra, est née en 1868 à Saint-Mandé (banlieue est de Paris), fille d'un instituteur protestant, Louis David, républicain, franc-maçon, communard et quelque peu anarchiste et libertaire, par ailleurs ami d'Elisée Reclus, le célèbre géographe-naturaliste qui écrivit en exil à Bruxelles l'essentiel de son œuvre opportunément qualifiée de révolutionnaire ; Alexandra, était fille aussi d'Alexandrine Borghmans, une bonne bourgeoise belge, catholique bon teint bien qu'issue d'une famille scandinave et protestante, qui résidait dans la commune bruxelloise d'Ixelles, au sud-est de la capitale, l'une des plus huppées du royaume de Belgique alors présidé par le jeune roi Léopold II.
Elle est le seul enfant du couple, mal aimée car sa mère désirait ardemment avoir un fils qu'elle aurait destiné à la prêtrise ou à l'épiscopat. Le relatif atavisme belge ne quitta jamais ce couple sentimentalement mal accordé (comme en témoigne le fait que le père, Louis David, fit baptiser en secret sa fille selon le rite protestant, et non catholique comme l'eut souhaité la mère). Alexandra n'avait pas cinq ans lorsque ses parents émigrèrent à Bruxelles.
On inscrivit la petite Alexandra dans les meilleures écoles bruxelloises mais celle-ci, guère appliquée, se dirigea rapidement vers le conservatoire de musique de Bruxelles ou elle excella dans le chant, le solfège, la danse et le piano, ce qui, plus tard, lui fut fort utile pour entamer et poursuivre avec succès une carrière de chanteuse lyrique de niveau international. Son adolescence fut plutôt difficile et, âgée à peine de 15 ans, elle fugua en Angleterre, séjour qu'elle mit à profit pour apprendre l'anglais à fond.
L'Indochine d'abord
Ensuite, elle s'installa à Paris où, là... fascinée par les collections asiatiques du musée Guimet qui venait d'ouvrir ses portes, elle se perfectionna dans l'apprentissage de la langue sacrée de l'Empire des Indes, le sanskrit ! Mais pour gagner sa vie (en l'absence de véritable soutien de sa famille) elle entama une carrière de cantatrice... qui la mena rapidement au grade d'artiste étoile de l'opéra Garnier de Hanoï, la capitale du nouvel empire colonial indochinois de la République Française. Mais elle cumula aussi les représentations dans d'autres centres de l'outre-mer, français ou non, notamment à Athènes, Beyrouth et à Tunis, ville où elle s'éprit d'un haut-fonctionnaire français (ingénieur en chef des chemins de fer de Tunisie), Philippe Néel, pour une union (le mariage fut célébré en 1904 alors qu'elle avait 36 ans) qui resta, tout au long de la vie de l'époux, purement platonique. Sept ans plus tard, à 43 ans, Alexandra décide de plaquer cette existence assez morne, et de se lancer pour le reste de sa longue vie (elle vécut centenaire) dans l'aventure de l'Orient : Inde, Chine, Japon, Russie et bien sûr le Tibet "interdit et inviolé", qui fut la grande affaire de sa vie, au point de se lancer dans l'adoption - en faisant vraiment son propre fils - le jeune moine-sherpa Aphur Yongden, alors que celui-ci n'avait que 14 ans. Il ne la quittera jamais.
Nous ne relaterons pas ici l'épopée tibétaine proprement dite, pas plus que son entrevue avec le 13e Dalaï-Lama (prédécesseur de l'actuel Tenzin Gyatso, 14e du nom, lequel prophétisa que son successeur pourrait être une femme): elle est à découvrir dans le merveilleux ouvrage-BD de Boro Pavlovic... ou dans les nombreux livres, autobiographiques ou non, écrit par celle que l'on appellera, au terme de ses succès littéraires, "la Parisienne de Lhassa", et dont la renommée internationale ne faiblira jamais. Même pas pendant les dernières décennies de sa vie, qu'elle passa à Dignes-les-Bains, dans les Alpes de Haute-Provence, à plus de 1.100 m. d'altitude, dans une vaste maison de pierre du pays convertie en lamaserie (et aujourd'hui en musée, classé au patrimoine historique national de France).
Alexandra David-Néel fut à la fois la "Tibéto-parisienne" de l'Himalaya et la Tibétaine d'adoption qui, comme le petit Tchang - le héros du Lotus Bleu hergéen - fut une brillante élève du Conservatoire royal de la Ville de Bruxelles.
Camille Vermont
Nous avons revisité l’Albanie en 2022 après l’avoir découverte une première fois en 2012 , ce qui nous donne l’occasion, sinon de dresser le bilan d’une décennie, du moins de témoigner aussi objectivement que possible des changements intervenus, non sans effectuer préalablement une brève présentation de ce pays peu connu du reste de l’Europe, à juste titre car pendant 45 ans (1946-1991) il est resté totalement coupé de l’Europe et du monde, exactement comme le reste, de 1953 jusqu’à nos jours, la Corée du nord, pays institutionnellement – et pathétiquement - confiné et qualifié à ce titre d’Etat ermite.
Rappelons d’abord que « l’Albanie » n’existe pas. Le nom officiel du pays est « Shqiperia », ce qui veut dire en albanais « le pays des aigles ». De la même manière que le mot « Chine » est une création occidentale, le nom officiel de ce pays, le seul que (re)connaissent 1,4 milliard de Chinois, étant « Zhongguo » qui signifie « Pays du milieu », ou que le mot « Finlande », autre création des barbares, c’est-à-dire des non-Finlandais, est « Suomi » signifiant «le pays des marais ». Avec l’Albanie, s’ajoute la particularité que « Shqiperia » est le nom du pays pour l’international alors qu’en interne et ceci en vertu de la syntaxe très particulière de la langue albanaise, on écrira Shqiperië. De même, lorsque vous atterrissez dans la capitale albanaise, vous découvrez l’immense enseigne « Tirana Airport », mais lorsque vous cherchez sur une plaque routière cette même destination, vous lirez « Tiranë ».
Idem pour la dénomination de la ville portuaire sur l’Adriatique, Vlora (tel qu’écrit sur les cartes) qui se lit Vlorë sur les routes, ou encore pour la ville historique de Kruja utilisée dans les livres et qui s’écrit Krujë sur les plaques. Impossible ici d’éviter d’évoquer le mystère sémantique de la langue albanaise, réputée l’une des plus compliquées de toutes les langues indo-européennes, une langue dont aucun expert ne s’accorde sur les origines véritables, qui dataient de l’époque pré-hellénistique : certains linguistes y voient des similitudes avec l’étrusque, le basque ou le maltais, autres langues européennes aux origines incertaines.
Pratiquement, l’Albanie (cette orthographe occidentale, ayant succédé dans l’Antiquité gréco-romaine à Illyrie et à Epire, désignerait le pays habité par l’ethnie Albanët ») est un pays s’étendant tout en longueur avec ses 362 km de côtes méditerranéennes, face à la région des Pouilles italiennes, calé entre les frontières de l’ex-Yougoslavie et celles de la Grèce. Sa superficie (28.750 km2) est équivalente à celle de la Belgique mais semble plus vaste quand on parcourt le pays par la route…surtout quand on sait que 70 % de sa superficie sont constitués de montagnes hautes (sommet de 2.753 mètres) et abruptes.
Les paradoxes sont partout
Le pays est peuplé de 3,1 millions d’habitants, mais en tenant compte de leur diaspora les Albanais seraient plus de 7 millions. En réalité, comme pour d’autres pays d’Europe centrale tels la Pologne ou la Hongrie, les peuplements (en Albanie) sont nombreux et parfois majoritaires chez ses voisins que sont le Kosovo, la Macédoine du Nord (dont est originaire la célébrissime Albanaise Mère Theresa de Calcutta), le Monténégro ou encore la Grèce.
Les paradoxes de ce peuple et de son Histoire sont partout. Ainsi le pays est majoritairement musulman (60 %)…mais cela ne se sent presque pas, puisqu’on voit autant d’églises chrétiennes (orthodoxes et catholiques) que de mosquées, des mosquées à minaret pointu et à coupole semi-sphérique comme elles le sont en Turquie, ce qui s’explique par le fait que l’Albanie a été envahie et occupée pendant cinq siècles (de 1444 à 1912) par l’Empire Ottoman : une Puissance hégémonique dont les janissaires persécutèrent des siècles durant les chrétiens, byzantins d’abord puis orthodoxes (et minoritairement catholiques romains), et ils ont tout expérimenté en ce compris la torture et les décapitations de masse pour forcer les conversions au culte mahométan. Il en est résulté un islam sunnite assez mou (dû au fait qu’aujourd’hui encore une famille musulmane sur deux compte des orthodoxes parmi ses aïeuls), un islam parcouru en outre par des tendances sectaristes, telles que les soufis, les hanafistes et les bektachistes.
On ne s’étonnera pas, dans ces conditions, que nous n’avons jamais vu, fût-ce dans les régions les plus reculées ou parmi les tranches les plus âgées de la population, une seule femme voilée, porteuse d’un tchador ou d’une burqa.
A la limite, on est resté pantois en découvrant en période de Noël, à Shkodër, une ville du nord, des guirlandes festives reliant par-dessus l’espace public le minaret de la grande mosquée…et la flèche de la cathédrale catholique : bel exemple de tolérance religieuse. Autant dire que ce n’est pas au sein de l’ethnie albanaise qu’on risque de recruter aujourd’hui des terroristes djihadistes ou des chrétiens traditionalistes lefebvristes. Il y a de quoi ! Quand on sait que le « petit Staline » que fut Enver Hoxha, dictateur ayant mené le pays d’une main de fer de 1946 à 1997, érigea en crime – ce que ne firent ni Staline ni Mao dans leur propre pays – le seul fait de déclarer son appartenance à une religion. Il faut dire qu’il avait transformé préalablement églises, mosquées, temples, chapelles et monastères en ateliers, granges, usine , dépotoirs et autres écoles du Parti unique. Beaucoup de croyants, quelle que soit leur obédience, ont poursuivi leurs activités cultuelles dans la clandestinité, enterrant, dissimulant ou camouflant les objets sacrés – souvent des trésors, des icônes, des reliques de saints et autres manuscrits incunables.
Comme pays souverain – ce que l’on appellerait aujourd’hui un Etat-Nation – l’Albanie est devenue indépendante en 1914 sous le nom de Principauté d’Albanie, puis en 1925 sous celui de République Albanaise. Son président, un noble propriétaire terrien, Ahmet Zogu, s’autoproclama Roi Zog 1er en 1928 (supprimant son prénom jugé trop musulman) et entreprit un début de modernisation (routes, écoles, hôpitaux, ports…à l’exclusion du chemin de fer, toujours inexistant) dans un pays resté arriéré et dont la population est largement analphabète (parce qu’une grande partie des familles refusaient de placer leurs enfant dans les écoles ottomanes où la langue turque était imposée). Cette renaissance ne dura pas et le pays fut envahi par l’Italie fasciste de Mussolini (jusqu’en 1943), puis par l’Allemagne d’Hitler (1943-1944) . Le gouvernement républicain démocratique mis en place en 1944 dura moins de deux ans et, infiltré par les communistes, se mua en république populaire tout en se brouillant successivement avec Moscou et avec Pékin.
La paranoïa des bunkers atomiques
Au point que « le dictateur » (Enver Hoxha, dont le nom même n’est jamais prononcé par les Albanais), devenu paranoïaque à la fin de sa vie, parsema le pays de centaines de bunkers enterrés… craignant que le pays ne soit un jour atomisé par les anciens alliés qu’étaient la Russie et la Chine populaire. Le plus grand de ces abris – un énorme complexe souterrain à l’est de Tirana - devait abriter le commandement militaire du pays en cas d’invasion ou d’occupation. Il a été converti en musée militaire sur les crimes du communisme et, partiellement, en centre d’art et en galerie d’expositions.
Ceci nous amène au chapitre plus réconfortant de l’attrait touristique nouveau de cette république européenne méconnue, désormais largement ouverte à l’étranger, et qui intéresse de plus en plus les tour-opérateurs internationaux. Car les paysages sont fascinants (et certains figurent sur la liste du patrimoine Unesco) , les sites historiques et archéologiques sont nombreux et diversifiés, comportant d’importants vestiges et champs de fouilles hellénistiques, romains, byzantins et ottomans ; le pays a restauré et réaffecté la plupart de ses anciens édifices religieux, dont certains sont monumentaux. D’autres, ultra-modernes dans leur architecture, ont été créés de toutes pièces au cours des vingt années qui ont suivi la chute de la dictature ; les musées sont nombreux, parfois pittoresques et toujours conçus à l’échelle humaine ; le coût de la vie, malgré les crises - sanitaire, énergétique et ukrainienne - est resté dérisoire, ce qui s’explique par un Produit Intérieur Brut (PIB) par habitant resté l’un des plus bas d’Europe ; la production d’énergie n’est pas un problème car les réserves hydro-électriques sont abondantes dans ce pays au relief montagneux ; en ce qui concerne , l’équipement hôtelier et les infrastructures touristiques, elles commencent à se rapprocher des normes et standards occidentaux.
En outre, le pays, même s’il a été secoué par de sérieux troubles sociaux dans les années nonante, a échappé aux affres de la guerre civile meurtrière qui a ébranlé l’ex-Yougoslavie.
La population albanaise est accueillante à l’égard des étrangers, même si les « langues de communication internationale » ne sont ni l’anglais (qui progresse chez les jeunes) ni le français, mais celles de leurs anciens occupants : l’italien et le turc.
Le fait est que les dix dernières années ont été marquées par une modernisation frénétique. La population, lorsqu’elle en a les moyens, se rue sur tous les biens de consommation, tels que véhicules 4X4, restaurants, activités sportives et culturelles. En dix ans, des dizaines d’immeubles-tours, souvent de conception audacieuse, sont sorties de terre à Tirana. Et la capitale commence à connaître ses premiers embouteillages, alors qu’il y a vingt ans encore, elle ne comptait pas plus de 3.000 voitures de tourisme !
Une nouvelle cathédrale catholique de style avant-gardiste a été érigée au centre de Tirana, pas loin du grand mudée historique qui fait la part belle à « l’héroïne nationale » (qui portait néanmoins la nationalité macédonienne, avant d’obtenir tardivement l’indienne) qu’est la Sœur Theresa, dont la statue trône sur le rond-point ouvrant sur l’aéroport ; tandis que la cathédrale orthodoxe Saint-Paul, interdite d’accès par les communistes, a été ravalée et restaurée de fond en comble.
Justement, cette république de Macédoine du Nord voisine, qui partage avec l’Albanie d’une part l’appartenance à l’Otan et de l’autre le fait d’être candidate à l’entrée dans l’Union Européenne, coopère avec Tirana sur le plan touristique en promouvant le tourisme sur la station balnéaire idyllique d’Ohrid, en bordure du lac éponyme, l’un des plus grands d’Europe, dont la superficie est partagée par les deux pays. Partout de Tirana à Ohrid le renouveau de la culture orthodoxe (ses monastères, ses processions, son artisanat) est remis à l’honneur.
Skanderberg ou l'icône de Napoléon
Le « nationalisme bon enfant » est lui aussi remis au goût du jour du renouveau touristique. Dans une ville albanaise de dimensions modestes, Krujja, au sud-est de Tirana, où se trouve, outre le musée historique dédié au « héros de la nation », le général Georges Skanderbeg (1444-1468), un personnage présenté comme l’égal de Napoléon 1er (le quel le cite nommément dans ses mémoires écrits à Sainte-Hélène), « la plus longue rue-bazar » d’Europe, énorme supermarché en plein air de gadgets sur les traditions albanaises et de plus rares antiquités. Bizarrement, le site classé au Patrimoine mondial de l’Unesco inclut - et l’on se demande bien pourquoi - ses horribles pavés géants qui rendent la traversée de la rue aussi cahoteuse.
Un paradoxe de plus au pays des aigles. Le dernier que nous évoquerons ici, puisé cette fois dans le registre économique, est une histoire qui finit bien. L’Albanie, pays essentiellement rural, n’est pas vraiment riche en ressources exportables notamment minérales. Il a cependant eu droit à une citation dans le livre Guinness des records : jusqu’il y a peu , en effet il était le premier producteur mondial (désormais il est 2e) de chrome, un métal rare. Ce fut pour le petit royaume devenu république une corne d’abondance jusque dans les années septante : en effet, au cours des décennies 1920 à 1970, ce minerai était capital pour l’ensemble de l’industrie automobile dans le monde. Pas une voiture (sauf les utilitaires) ne sortait des chaînes de montage sans être équipée de pare-chocs revêtus de chrome, accessoire d’autant plus rutilant que le modèle était luxueux. Las ! A partir des années quatre-vingt la mode du pare choc rutilant, et même du pare choc tout court, avait pris fin. Ce fut l’arrêt du robinet à devises de l’Albanie, qui vit sa production et ses exportations baisser sensiblement. Mais, alors qu’aucun responsable albanais n’y croyait plus, le miracle survint deux décennies plus tard – un vrai « miracle » car c’était aussi l’époque du grand retour de la religion ! : la demande de chrome reprenait tout à coup et massivement. Le chrome devenait un de ces métaux entrant dans la composition des circuits électroniques et de tout ce qui touche à l’informatique. La pompe à devises albanaise se reconnectait, alléluia !
Le mot de la fin de cette présentation du pays des aigles, nous le donnons à Hergé, le génial créateur de Tintin, dont les propos qui suivent ont été rapportés par un de ses amis qui fut par ailleurs un de ses bons biographes, l’écrivain Pierre Assouline. Ce dernier demanda à Georges Remi s’il pouvait lui commenter si peu que ce soit la genèse de l’album « Le Sceptre d’Ottokar ».
Voici ce qu’il lui répondit :
« Si tu as un peu suivi l’histoire, tu verras qu’elle est tout à fait basée sur l’actualité [du moment]. La Syldavie, c’est l’Albanie. Il se prépare une annexion en règle [celle de l’Albanie par l’Italie de Mussolini, Ndrl]. Si l’on veut profiter du bénéfice de cette actualité, c’est le moment ou jamais ».
La Syldavie, dernier candidat à l’admission au sein de l’Union Européenne ? Bon sang mais c’est bien sûr !
André BUYSE
Voici en guise de « mot de la fin » de ce numéro 206 de notre « Magazine de l’UPPFB » new look, un court poème de ce grand poète et philosophe libanais que fut Khalil Gibran (1883-1931) qui vécut longtemps à New York, où il décéda.
Un sourire
Un sourire, c‘est du repos pour l’être fatigué
un courage pour l’âme abattue,
de la consolation pour le cœur endeuillé.
C’est un véritable antidote que la nature
tient en réserve pour toutes les peines.
Et si l’on vous refuse le sourire que vous méritez,
soyez généreux, donnez le vôtre.
Nul n’a en effet autant besoin d’un sourire
que celui qui ne sait en donner.
Chacun d’entre nous recèle une part de beauté,
Il suffit de la faire rayonner de l’intérieur
vers l’extérieur.
Khalil Gibran